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ACTUALITÉS NATIONALES

12 octobre 2019

Une école « all inclusive » ?

Depuis plusieurs années, l’école inclusive est mise en exergue par notre administration. L’École accueille un public toujours plus large. Il ne faut pas se leurrer, c’est bien un bouleversement de notre métier qui se joue actuellement, tant philosophiquement que pratiquement.

 

Personne n’oserait remettre en cause le bien-fondé de la volonté d’offrir un enseignement de qualité au plus grand nombre d’élèves possible. Mais le satisfecit du Ministère et des DSDEN concernant le nombre croissant d’élèves en situation de handicap accueillis dans les écoles (340 000 en 2018 contre 118 000 en 2005) n’est pas partagé par tous les acteurs de la communauté éducative. Loin de là.

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Force est de reconnaître que ce n’est pas la même chose d’inclure dans une classe un élève violent en attente d’une place en ITEP ou un élève dyslexique avec un ordinateur portable et une AESH pour l’aider. Les difficultés sont souvent démultipliées par différents facteurs. L’exercice de notre métier devient plus difficile. Il est parfois vécu comme impossible.

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Faut-il pour autant baisser les bras ? Rejeter ceux auxquels l’École vient d’offrir une place ? Évidemment non.

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Aujourd’hui, deux réalités se télescopent. D’une part, certaines familles patientent en vue d’une solution. Certains élèves attendent encore et toujours leur AESH. D’autre part, il faut être lucide, bon nombre d’équipes enseignantes se retrouvent déstabilisées et souvent démunies face aux difficultés liées à l’inclusion de certains enfants dans les classes.

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Les enseignants et les AESH en première ligne

 

Proche du terrain, le SNE a conscience des réalités. Notre syndicat sait que derrière les beaux discours – que personne ne peut moralement remettre en question – ce sont les acteurs du quotidien qui doivent faire face à ces changements brutaux.

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Ces acteurs, ce sont en premier lieu les enseignants. Ils doivent s’adapter aux besoins et aux aptitudes de chacun, dans des classes de 23 élèves en moyenne (mais c’est juste une moyenne !) qui peuvent compter plusieurs enfants en situation particulière : primo-arrivants, élèves à besoins éducatifs particuliers (bénéficiaires d’un PAI, d’un PPRE, porteurs de handicap…), EHPI (élèves à haut potentiel intellectuel)... La liste s’allonge au gré des sigles dont l’Éducation nationale est friande, et au gré des cas particuliers qui nous font oublier le cas général.

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En second lieu nous n’oublions pas les AESH qui doivent épauler des élèves aux difficultés desquels ils ne sont pas toujours formés. Quant aux autres élèves des classes concernées, ils pâtissent eux aussi de la situation actuelle.

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Une règle générale qu'il faut pouvoir adapter

 

En quelques années, l’École a amorcé un grand virage, au point de devenir parfois une vaste infirmerie où l’on tente, à grands renforts de publicité, de faire avaler des comprimés de plus en plus indigestes avec un grand verre d’eau. Au-delà du problème de moyens, auquel le ministère a promis d’apporter une réponse rapide, se pose le problème plus crucial de l’intérêt général des élèves.

 

La loi du 11 février 2005 fut, à l’époque unanimement approuvée. Elle propose une règle générale de mise en œuvre d’une scolarisation. Mais cette dernière s’avère très complexe. Elle nécessite en fait autant de solutions qu’il y a de cas puisque chaque élève est différent, et n’a pas le même type de handicap.

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De nombreuses remontées du terrain font état d’élèves impossibles à gérer au sein d’un collectif, qui perturbent tant le déroulement du travail en classe que les autres élèves se dissipent, voire ne bénéficient plus de toute l’attention à laquelle ils ont droit eux aussi. On est également en droit de se poser la question de savoir si chaque élève en situation de handicap tire un bénéfice effectif de son inclusion.

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Une formation nécessaire mais pas suffisante

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Au SNE, nous sommes persuadés  que la formation est indispensable et serait bienvenue, notamment pour familiariser les collègues avec les « dys » ou adapter leur façon de faire avec les bénéficiaires de PAP par exemple.

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Mais nous pensons également que cette formation ne sera pas le remède miracle comme on voudrait nous le faire croire, par exemple face à des enfants ayant une notification d’accueil en établissement spécialisé. Ces enfants méritent de travailler avec de véritables spécialistes, dans des conditions d’accueil spécifiques.

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La récente faillite d’un voyagiste international ayant fait du « all inclusive » son fer de lance doit nous alerter sur le sens premier de notre mission d’enseignant.

 

L’école est -elle là avant tout pour inclure sans limite ou pour instruire le plus grand nombre possible dans les meilleures conditions possibles ? C’est un choix sociétal de première importance dont il faudra savoir tirer toutes les conséquences.

 

Laurent Hoefman

Président du SNE

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Qu'elle soit sereine ou compliquée, faites-nous, vous aussi, partager votre expérience en matière d’inclusion.

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