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ACTUALITÉS NATIONALES

22 mai 2025

Le primaire prend l’eau

La Cour des Comptes a rendu un rapport sur l’enseignement primaire, le 20 mai 2025. Son constat est plutôt alarmant : la dépense publique (état et collectivités locales) et privée (parents) a augmenté pour de bien piètres résultats : les élèves français stagnent dans le bas des classements internationaux, les inégalités sociales demeurent prédominantes dans le niveau des élèves, le métier d’enseignant n’attire plus, la gouvernance des écoles est trop centralisée et l’organisation du temps de travail des élèves est en décalage avec les besoins des enfants. Le SNE partage ce triste bilan. La Cour préconise six solutions pour améliorer la situation, des solutions avec lesquelles le SNE est globalement en opposition.

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Avant toute autre chose, notre syndicat relève que la Cour des Comptes envisage qu’il faut placer l’élève au centre des ambitions collectives. Au SNE, nous pensons plutôt qu’il faudrait placer le savoir et la lutte contre l’ignorance au cœur de l’école.

 

Le SNE rappelle aussi que le niveau de dépense en pourcentage du PIB en faveur du primaire en France est inférieur à celui de la moyenne des autres pays de l’OCDE.

 

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Des améliorations pour les professeurs des écoles

 

La Cour considère que le métier souffre d’une crise d’attractivité, notamment dans certaines académies. Elle suggère de «proposer dans une des académies présentant de fortes difficultés de recrutement de professeurs, la possibilité de prévoir une affectation, à l’issue du concours, par département et instaurer des règles facilitant, in fine, la mobilité géographique» en octroyant un bonus pour le mouvement interdépartemental.

 

Le SNE défend depuis longtemps une amélioration de la mobilité. Le changement envisagé peut être intéressant. Pour notre syndicat, c’est sur l’ensemble du territoire qu’il faudrait assouplir les règles du mouvement.

 

La Cour préconise «une amélioration de la formation initiale et continue des enseignants, notamment pour favoriser une meilleure intégration du numérique comme outil au service de la pédagogie.»

 

Le SNE défend une formation pragmatique, centrée sur des pratiques qui ont fait leurs preuves et qui répondrait, pour la formation continue, aux besoins locaux. Le numérique n’est en rien l'alpha et l’oméga de la réussite de l’école. D’ailleurs, certains pays, comme la Suède par exemple, qui prônaient le tout numérique reviennent sur leurs pas. C’est un outil parmi tant d’autres.

 

Recruter des enseignants de qualité en nombre suffisant est un enjeu majeur qui mérite des mesures d’envergure, à la hauteur des enjeux que sont l’avenir des jeunes français et celui de notre pays. Pour le SNE, il est primordial que les professeurs des écoles retrouvent une place importante dans la société. Pour cela, il est indispensable de mieux les rémunérer, de leur assurer une progressivité de leur rémunération tout au long de la carrière et de leur ouvrir des passerelles vers d’autres fonctions. Leurs conditions de travail sont aussi à améliorer, en commençant par le passage à une école inclusive qualitative et non plus quantitative. Les enfants dont les besoins relèvent d’une prise en charge médicale doivent pouvoir en bénéficier dans des structures adaptées, les élèves qui nécessitent un accompagnement humain doivent le recevoir en entier. Il est à noter que l’extrême hétérogénéité des classes demande par ailleurs aujourd’hui un travail d’individualisation quasi-impossible à assumer pour un professeur.

 

Un enseignant qui se démultiplie en permanence ne peut pas accorder à chaque élève toute l’attention qui lui est nécessaire. Enfin, le blason du professeur des écoles doit être redoré. Sa position de savant et de professionnel de l’enseignement nécessite d’être réaffirmée et soutenue. L’instruction revient aux enseignants, l’éducation aux parents.

 

Les solutions envisagées par la Cour des Comptes pour les professeurs des écoles n’impliquent aucun engagement financier. De là à dire qu’elles sont sans réelle ambition pour les professeurs des écoles, il n'y a qu'un pas que le SNE franchit.

 

 

Une amélioration pour les enfants

 

La Cour suggère d’«assurer une progressivité de l’usage numérique éducatif afin de prendre en compte les facteurs de développement et de bien-être de l’enfant»

 

Le SNE remarque que la Cour des Comptes semble ici confondre élève et enfant. Il est de plus en plus courant de voir des enfants utiliser des outils numériques avant même d’entrer à l’école maternelle. Gérer avec parcimonie l’usage du numérique à l’école, aider les élèves à s’en détacher pour mieux l’appréhender ensuite sont des priorités qui relèvent presque de la santé publique. Ici, éducation et instruction s’opposent.

 

 

Une autre direction d’école

 

La Cour des Comptes prône une nouvelle organisation de l’école, avec une refonte totale de la position des directeurs d’école : «engager la réforme du statut de directeur d’école en généralisant progressivement la fonction de directeur à temps complet, en commençant par les écoles regroupées». Pour arriver à cela, le rapport propose de «systématiser les regroupements pédagogiques ou les regroupements d’écoles dans les territoires confrontés à une baisse des effectifs».

 

Pour le SNE, il y a là une ligne rouge. Vouloir absolument des directeurs d’école totalement déchargés et surtout vouloir qu’ils aient un statut signifie, en droit, créer un corps. C’est à dire que pour devenir directeur d’école il serait nécessaire de passer un concours, que les directeurs ne seraient pas forcément des enseignants et que, en devenant directeur, un professeur des écoles perdrait son statut d’enseignant. Le retour en arrière ne serait plus possible. Il y aurait de fait, comme pour les personnels de direction, d’autres contraintes associées (contrainte géographique, mobilité obligatoire, nécessité d’assurer une astreinte, …) Et comment imaginer qu’un tel directeur n’aurait pas de pouvoir hiérarchique sur les adjoints ?

 

La Cour des Comptes ne se cache pas de vouloir un directeur calqué sur le modèle du principal ou du proviseur. Ce serait la fin d’une spécificité du primaire. Le SNE, lui, milite pour une autorité fonctionnelle plus large, mieux définie et pour des évolutions sur les critères de décharge, de rémunération et de prise en compte de cette fonction pour le calcul de la retraite. Ce qui fonctionne dans le second degré n’est pas forcément transposable à l’école primaire.

 

C’est bien pour cela que le SNE défend la reconnaissance, l’amélioration et la valorisation des spécificités du 1er degré. De plus, ce rapport oublie un aspect de la profession : l'humain. Comment répondre aux besoins des familles, des collègues, comment créer une dynamique à distance sans être proche et présent dans les écoles ? Rappelons que la plupart des directeurs sont responsables de petites structures et sont le ciment qui lient les individus sur tout le territoire.

 

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Une liaison rapprochée entre les écoles et les collectivités territoriales

 

La Cour des comptes souhaite «établir des conventions triennales entre les élus concernés et les services de l’éducation nationale permettant d’objectiver la politique éducative du territoire (ministère de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche, ministère de l’intérieur, associations d’élus municipaux)»

 

L’idée de base est intéressante, mais comment éviter de voir l’État se décharger du poids de certaines missions sur les collectivités territoriales ? Le manque de moyens n’empêche pas le ministère de clamer les réussites de l’école inclusive alors que les AESH mutualisés voient le temps par élève réduit à peau de chagrin. Les personnels, AESH et enseignants, supportent le poids des choix de l’administration. Le SNE demeure sceptique, et c’est peu dire, face à cette proposition.

 

Par ailleurs, la décentralisation souhaitée par a cour des comptes ne peut s’effectuer sans moyens ni accompagnement.

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