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ACTUALITÉS NATIONALES

10 juin 2025

Former à protéger pour mieux enseigner

La situation 

 

Chaque jour, des milliers d’enseignantes et d’enseignants se retrouvent en première ligne face à des élèves en détresse. Souvent démunis, peu de professeurs ont été formés pour détecter les signes de maltraitance et être capable d’accueillir la parole des enfants en danger. De ce fait, ils ne peuvent enseigner de manière efficiente face à des élèves qui ont d’autres préoccupations que les apprentissages. De plus, rédiger une information préoccupante expose encore trop fréquemment le personnel éducatif à des représailles car leur identité est communiquée aux familles concernées.

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Il est primordial que des mesures soient prises sans délai afin de permettre ainsi aux collègues de remplir leurs missions d’enseignement et leurs obligations légales*.

Former les enseignants à l’accueil de la parole de l'enfance en danger : une nécessité, pas une option

 

Quelques modules existent dans la formation initiale. La plupart du temps, ils sont survolés et non systématiques. En général, seul le personnel de direction d’école a été rapidement informé sur la procédure à suivre lors d’une courte formation. Trop souvent, l’équipe éducative “enquête”, prend rendez-vous avec des parents, “cherche à connaître la vérité”, plutôt que d’accueillir la parole de l’enfant et de la transmettre aux autorités compétentes.

Résultat : nombre d’enseignants ne savent pas reconnaître les signaux d’alerte qui indiquent qu’un enfant est victime de violences sexuelles, physiques ou psychologiques et s’embourbent parfois dans des enquêtes qui sont le travail des autorités judiciaires.

Selon l’Observatoire National de la Protection de l’Enfance (ONPE), plus de 90 000 mineurs sont signalés en danger chaque année. Un chiffre qui serait probablement sous-estimé…

Il serait indispensable et pertinent d’inclure un module obligatoire sur la détection et l’accompagnement de l’enfance en danger dans la formation initiale des enseignants. La formation continue doit aussi prévoir des sessions régulières, adaptées aux réalités du terrain, pour donner des outils nécessaires afin d'agir avec justesse et efficacité. Accompagner le personnel éducatif doit se faire avec des professionnels et des experts de l’enfance en danger, des mises en situation concrètes et des cas pratiques.

Dans certaines DSDEN, circonscriptions et écoles, une assistante sociale, une infirmière et/ou un éducateur sont référents pour conseiller les collègues en cas de doute ou de suspicion de violences sur les élèves.

Cela permet d’avoir un contact régulier et de faciliter les démarches. Pour le SNE, il est nécessaire d’accompagner et de soutenir les collègues avec des professionnels dont c’est le métier. L’équipe éducative pourrait se sentir soulagée d’être en lien avec une équipe spécialisée. 

Anonymer les signalements 

 

Aujourd’hui, lorsqu’un enseignant ou un directeur fait une information préoccupante** (IP) ou un signalement enfance en danger, son nom peut être transmis à la famille concernée. Cette pratique, loin d’être anodine, expose les enseignants à des ripostes, parfois violentes, insultes, menaces, voire agressions. Nombre d’entre eux hésitent à signaler ces actes par crainte de représailles. Cette situation n’est pas acceptable et contrevient au principe même de la protection de l’enfance.

Le SNE propose une modification législative visant à anonymiser systématiquement les signalements et les IP rédigées par les enseignants, les AESH et les directeurs. Les informations préoccupantes et signalements doivent être réalisés au nom de l’État et de l’Éducation nationale, sans mention du personnel scolaire ayant effectué la démarche. Cette mesure garantira une protection indispensable à ceux qui se battent pour enseigner en sécurité aux élèves, sans risquer de mettre en péril leur propre intégrité. 

Un engagement nécessaire pour une école où il fait bon apprendre et enseigner

 

Les professeurs ont besoin d’un environnement serein pour exercer leur métier. Les élèves ont besoin d’un environnement stable pour apprendre. Un élève qui a été violé, brimé ou battu avant de venir à l’école ne pourra pas se concentrer pour assimiler les apprentissages fondamentaux. Avant même de parler de programmes scolaires et de pédagogie, l’école doit être un lieu sécurisant où la parole des enfants en détresse peut être entendue. Pour cela, il est impératif de former les enseignants, de les accompagner et de les protéger lorsqu’ils remplissent leur devoir de vigilance. 

Le SNE appelle le gouvernement à prendre ses responsabilités : investir dans la formation et modifier la loi pour garantir l’anonymat du personnel éducatif. Seule une action concrète et immédiate permettra d’assurer aux personnels éducatifs et aux élèves un cadre sûr et bienveillant, véritable socle de toute réussite scolaire et humaine. 

 

Face à cette situation alarmante, le SNE, s’associe à la Défenseure des droits, Claire Hédon pour dénoncer de graves atteintes aux droits des enfants.

Textes de référence et données chiffrées

 

Article 3 Convention internationale des droits de l’enfant, CIDE

Alinéa 2 «Les États parties s’engagent à assurer à l’enfant la protection et les soins nécessaires à son bien-être, compte tenu des droits et des devoirs de ses parents, de ses tuteurs ou des autres personnes légalement responsables de lui, et ils prennent à cette fin toutes les mesures législatives et administratives appropriées.»

Alinéa 3 «Les États parties veillent à ce que le fonctionnement des institutions, services et établissements qui ont la charge des enfants et assurent leur protection soit conforme aux normes fixées par les autorités compétentes, particulièrement dans le domaine de la sécurité et de la santé et en ce qui concerne le nombre et la compétence de leur personnel ainsi que l’existence d’un contrôle approprié.»

Article 40 du Code de procédure pénal

«Toute autorité constituée, tout officier public ou fonctionnaire qui, dans l'exercice de ses fonctions, acquiert la connaissance d'un crime ou d'un délit est tenu d'en donner avis sans délai au procureur de la République et de transmettre à ce magistrat tous les renseignements, procès-verbaux et actes qui y sont relatifs.»

Article 4334-3 du Code pénal : “La non-dénonciation d’une situation de maltraitance dont on a connaissance peut être punie de 3 ans de prison et de 45 000 € d’amende.“

**Art. L226-2-1 du Code de l’action sociale et des familles : les familles doivent être prévenues de l’envoi de l’information préoccupante, «selon des modalités adaptées», sauf si cette information peut nuire à la sécurité de l’enfant ou entraver le cours d’une enquête judiciaire.

Des chiffres clefs : 

  • (En 2022, le 119 a traité les situations de 40 334 enfants en danger*)

  • 24 % des français et des françaises de plus de 18 ans estiment avoir été victimes de maltraitances graves dans leur enfance.

  • Chaque année, 160 000 enfants sont victimes de violences sexuelles, dont 77 % au sein de la famille (estimation CIIVISE, commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants)

  • En 2022, 31 % des parents déclarent que leur enfant a été au moins une fois victime de cyber-violence au cours de sa vie numérique.

*chiffres issus du plan de lutte contre les violences faites aux enfants 2023-2027.

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