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ACTUALITÉS NATIONALES

6 avril 2023

L’inclusion au bénéfice de tous

Lorsque nous rencontrons des collègues lors de nos visites dans les écoles, nous prêtons une oreille attentive à leurs éventuelles doléances. Les souffrances exprimées sont souvent importantes, et proférées avec véhémence. La plupart du temps, elles concernent l'inclusion.

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L'immense majorité des collègues est pourtant favorable à l'accueil des enfants à besoins éducatifs particuliers. Leur engagement force le respect. Leurs désillusions et leurs remarques n'en ont que plus de poids. 

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Il faut bien sûr distinguer les cas extrêmes de ceux qui constituent l'essentiel des cohortes à accueillir. Pour autant, les cas extrêmes sont suffisamment fréquents pour ne pas être considérés comme marginaux. Certains élèves sont parfaitement ingérables. Ils ne relèvent pas des compétences d’un enseignant du 1er degré en classe ordinaire. Au quotidien, l’institution commande pourtant de les accueillir, quitte à imposer ensuite de "faire avec" sans moyens particuliers.

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Nos constats

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La loi de 2005 prévoit un accueil de tous les élèves en milieu ordinaire. La transformation de la classe en "milieu extraordinaire" contrevient à l'esprit de la loi. Cela doit interpeller le législateur.

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Il est devenu courant de rencontrer dans les classes des élèves dont les troubles du comportement sont particulièrement envahissants. Ces enfants étaient autrefois pris en charge par des équipes pluridisciplinaires, composées d'un médecin, d'un psychologue, d'un infirmier, d'un éducateur spécialisé, d'un enseignant. Ils totalisaient à eux tous plus de 15 ans d'études. Leur pratique nécessitait la coordination de leurs expertises respectives.

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Aujourd’hui, tout leur travail ou presque incombe à un enseignant. Le plus souvent seul. A charge pour lui de pratiquer en parallèle un métier annexe : professeur des écoles, auprès d'une cohorte d'élèves "sans besoins particuliers", mais dont la gestion de l’hétérogénéité pèse déjà très lourdement sur sa charge mentale. On imagine facilement le caractère impossible de la mission, même en étant épaulé par un AESH. Dans certaines classes, c’est la cour des miracles… 

 

Le principe de réalité confronte les collègues à des situations inextricables et pathogènes. Le système est perdant/perdant. L’élève concerné ne reçoit pas les soins dont il a besoin. Le collègue est confronté à son impuissance et à des conditions de travail effroyables. Les autres élèves pâtissent de ces mêmes conditions et la République voit les efforts de ses loyaux fonctionnaires se diluer dans un combat perdu d’avance, avec les résultats européens que l’on sait.

 

Notre hiérarchie est consciente de ce problème. Elle s’en confie à demi-mots, en aparté lors de certaines réunions. Il serait temps qu’elle réagisse. 


 

De pâles réponses institutionnelles

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Face à ces situations, l’institution propose deux réponses : le recours aux pôles ressources et à la formation. 

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Les pôles ressources sont souvent saisis dans l’urgence. Les réseaux d’aide diminuant, les pôles sont parfois réduits à une portion congrue. Ils mettent en place des protocoles qui, avec un peu de chance, allègent opportunément la tâche des collègues concernés. Mais il ne s’agit que de bricolages ponctuels qui parviennent tout juste à maintenir les situations sous les limites du supportable. 

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Quant à la formation, il est illusoire et dangereux d’attendre de quelques heures d’étude l’équivalent d’un cumul de quinze années universitaires. D’une part, nous connaissons tous la qualité des formations initiales et continues de notre institution ; d’autre part, la qualification que pourrait conférer ces formations légitimerait l’exigence de l’institution envers les collègues. Elle banaliserait encore davantage l’accueil de cas aussi lourds que nombreux. Tout retomberait à nouveau sur les seules épaules de l’enseignant. Ces solutions ne sont donc pas satisfaisantes.

 

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Une piste de réflexion

 

L’existence de classes ULIS démontre que l’institution reconnaît la pertinence d’un accueil différent pour les élèves à besoins particuliers. 

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Si la loi prévoit l’accueil à l’école pour tous les élèves, elle ne précise pas “la même classe pour tous”. Dès lors, selon les situations, il est possible de prévoir un accueil en classe à effectifs très allégés, avec l’intervention régulière de plusieurs professionnels complémentaires. 

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Le principe de l’intégration est alors plus logique : l’élève passe l’essentiel de son temps dans “sa” classe, et peut, selon ses capacités et ses progrès, intégrer une classe traditionnelle une ou plusieurs heures par semaine. 

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C’est tout l’inverse de ce qui se pratique communément à l’heure actuelle : les élèves sont accueillis toute la semaine dans une classe standard, et bénéficient ponctuellement d’une à deux heures de soins spécifiques.

 

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Les propositions du SNE

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Certains élèves se voient reconnaitre le droit à un accueil en classe spécialisée (IME, SESSAD, ITEP, ULIS…). Le SNE propose que cet accueil devienne systématiquement effectif. Celui-ci doit devenir la norme pour les élèves à besoin éducatif particulier, pour lesquels un aménagement ou une compensation pédagogique ne suffit pas. Il ne doit pas être dénaturé par le manque de place dans tel ou tel dispositif. Si la classe ordinaire à temps plein n'est pas la bonne solution pour un enfant relevant d'ULIS, l'ULIS n'est pas non plus la structure adéquate pour un enfant relevant d'IME ou d'ITEP. Cette situation est pourtant trop souvent vécue par les collègues spécialisés, par manque de place dans les bonnes structures.

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Cet accueil doit évidemment aller de pair avec une intégration progressive en milieu ordinaire quand elle est possible, et non l’inverse. Idéalement, cet accueil aurait lieu dans des classes avec un nombre d’élèves raisonnable.

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Dans ce cas de figure, le principe de l’inclusion est respecté, mais la mise en œuvre devient enfin réaliste et à la portée de tous les collègues. 

 

Il existe évidemment des cas d’élèves qui ne relèvent pas de classe spécialisée, mais qui ont tout de même besoin d’une assistance type AESH. Dans ces cas-là, l’accueil de l’élève doit être conditionné à la présence de l’AESH ou des moyens prévus. La présence d’un réseau spécialisé avec un nombre de personnes suffisant pour les écoles qu’il chapeaute est évidemment plus que souhaitable. 

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Lorsque l’AESH n’est pas encore recruté ou absent et non remplacé, lorsqu’un soin a été préconisé mais qu’il n’y a plus de place, la variable d’ajustement ne doit pas être l’enseignant. Dans ces cas-là, l’élève ne doit pas être accueilli.

 

Dans ce nouveau système gagnant/gagnant, l’élève concerné recevrait les soins dont il a besoin, l’enseignant retrouverait le métier pour lequel il a signé (professeur des écoles et non “éducateur spécialisé”) et le bonheur d’une mission accessible, les élèves profiteraient d’une atmosphère de classe plus sereine, de la disponibilité de leur enseignant, et la République percevrait le rendement pédagogique qu’elle attend de tant d’engagement.

NOS IDÉES POUR L'ÉCOLE

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